Guitard de Ratte

De Marquerose
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Biographie selon Fisquet

Né à Montpellier, en 1552, d'une famille de robe, il était fils de Jean de Ratte, lieutenant du viguier de Gignac, et de Marguerite de Cambous. Conseiller-clerc au parlement de Toulouse, il avait, au milieu des troubles causés en cette ville par les ligueurs, montré une courageuse énergie. Lié avec Jean-Etienne Duranti, président au parlement, et avec Jacques Daffis, avocat général, Guitard de Ratte était destiné par les factieux à subir le sort de ces deux premiers magistrats, qu'ils massacrèrent le 10 février 1589. Mais peu de jours auparavant, Guitard, porteur d'une missive de Duranti, avait quitté la ville pour aller à Paris instruire Henri III de tout ce qui se tramait à Toulouse. Les ligueurs, ne pouvant atteindre sa personne, pillèrent sa maison et ses livres et lui tirent faire son procès par le parlement, qui le condamna par contumace 'à avoir la tête tranchée. Sur ces entrefaites, le roi Henri IV étant parvenu à la couronne, donna à Guitard de Ratte de nombreuses marques de son affection, et pour l'indemniser des pertes qu'il avait faites à Toulouse, lui assigna; une pension viagère de 12,000 livrés, et le fit abbé de Saint-.Sauveur de Lodève. Ce prince le chargea d'aller traiter en Normandie avec Gaspard de Pelet de la Vérune, son parent, lieutenant du roi dans cette province, et/gouverneur du .château de Caen, afin qu'il lui conservât cette place et qu'il engageât la noblesse du pays à lui rester fidèle. La négociation réussit pleinement ; mais Guitard, à son retour, tomba aux mains des ligueurs, qui s'apprêtaient à lui faire un mauvais parti, lorsque Henri IV parvint à le délivrer. Le roi, pour le récompenser, lui donna en commende l'abbaye du Val-Richer, au diocèse de Bayeux, puis, le 15 février 1596, l'abbaye de Saint-Chinian, au diocèse de. Saint-Pons de Tomières, et le fit-son aumônier, Antoine de Subjet, qui se l'était attaché en qualité de vicaire général, archidiacre de Valence, lui résigna, le 15 juillet 1596, l'évêché de Montpellier; mais ce prélat étant mort avant que sa démission eût été agréée par le souverain Pontife, le cardinal d'Ossat, chargé des affaires de France à Rome, écrivit au roi le 17 janvier 1597, de nommer Guitard de Ratte à cet évêché, comme vacant par mort. Aussitôt après avoir reçu ses bulles, Guitard se fit sacrer le 18 juillet 1597, à Paris, par le cardinal Pierre de Gondi, évêque de cette ville, et partit pour Montpellier où-il fit son entrée solennelle le 5 novembre suivant. Il recouvra presque aussitôt une partie des reliques de saint Germain, de saint Maur, de saint Christophe et de saint Lazare, que pendant les guerres religieuses et pour les soustraire à la profanation, un chanoine de Montpellier avait transportées à Martigues, en Provence, sa ville natale. Le parlement de Toulouse, à la requête du procureur général, rendit, le 20 août de l'année suivante, un arrêt aux termes duquel la sentence de prise de corps et de condamnation à mort portée en 1589 contre Guitard de Halte devait être retirée de ses registres, et les procédures sur lesquelles ces arrêts avaient été rendus, devaient être biffées et lacérées. Au mois de mai de cette année, Guitard de Ratte avait, par les mesures d'une sage prudence, dissipé un synode que voulurent tenir à Montpellier 150 ministres du culte réformé. L'édit de Nantes, qui leur permettait l'exercice de leur religion, venait d'être promulgué, aussi Guitard se montra plein "aie zèle pour faire rendre aux catholiques tous les biens et droits que cet édit leur assurait. Jaloux de ramener au bercail quelques-unes des brebis égarées, il entreprit une visite générale de son diocèse et se fît accompagner dans ses courses apostoliques de missionnaires instruits et éloquents. Ce fut alors qu'il ordonna la reconstruction des églises de Mireval, de Pignan et de Cournonterral ; mais les religionnaires détruisant avec persistance, pendant la nuit, le travail de chaque journée, Guitard de Ratte fut contraint de permettre la célébration du service divin dans dès maisons particulières.

L'église de Notre-Dame des Tables étant à Montpellier la seule qui n'eut pas été entièrement démolie, l'évêque voulut en reprendre possession. Pour prévenir l'opposition des protestants il députa au roi trois des notables de la ville pour en faire la demande. Henri IV renvoya cette affaire aux commissaires qu'il avait nommés pour faire exécuter l'édit de Nantes, enregistré à Montpellier, le 12 février 1600. Au commencement de décembre de cette année, Chamlay et Du Bourg, commissaires dans le Bas-Languedoc, se rendirent à Montpellier avec le duc de Ventadour. Après avoir entendu Guitard de Ratte, les commissaires-lui adjugèrent l'église Notre-Dame, bien que Du Bourg, l'un d'eux, appartînt à la religion réformée. Ce prélat prit jour avec eux au 28 du mois de décembre pour s'en assurer la possession, mais à peine eût-on commencé la démolition d'un ravelin qu'on avait construit au devant de la porte principale de cette église, que la populace s'étant ameutée, fît voler sur les ouvriers une-grêle de pierres. Soudain et au bruit du tocsin, le peuple prend les armes et accourt en foule. Le duc de Ventadour, impuissant à réprimer l'émeute, est obligé de se retirer avec ceux des chanoines qui avaient accompagné leur évêque. Guitard de Ratte, au contraire, demeura ferme au pied du ravelin avec quelques gentilshommes prêts à le défendre et fît preuve en cette circonstance de la plus grande intrépidité. Informé sur-le-champ de cette révolte, Henri IV, qui était alors à Lyon, rendit en son conseil, le 16 janvier 1601, un arrêt par lequel il ordonna l'arrestation des principaux auteurs de cette sédition populaire et la restitution aux catholiques de toutes les églises de Montpellier, sans excepter même le clocher de celle de Notre-Dame. Ce fut en enlevant les décombres dont cette dernière église était remplie, qu'on découvrit dans son état primitif et tout à fait intacte la chapelle souterraine de Sainte-Madeleine. Guitard de Ritte la fit nettoyer et y célébra les saints mystères le 4e dimanche de Carême, 27 mars 1602. Ce jour-là il conféra les ordres mineurs à plusieurs jeunes lévites au nombre desquels se trouvait Pierre Gariel qui devait être un jour le premier historien de Montpellier et des évêques de Maguelone. Gariel, alors chanoine de la collégiale d'Aigues-Mortes, avait été tonsuré en 1597.


Peu après, Guitard de Ratte fit un voyage à Toulouse pour les J affaires de son Église. Trois chiens énormes, s'étant, aux approches de cette ville, jetés avec fureur sur le cheval qu'il montait, l'infortuné prélat fut renversé et mourut de cette chute le dimanche, 7 juillet 1602, à l'âge de 50 ans. Son neveu, Pierre de Ratte, conseiller à la cour des aides de Montpellier, voulut lui faire donner la même sépulture qu'avaient eue ses prédécesseurs. Il fit porter son corps à Montpellier après l'avoir fait embaumer, et enfermer dans un cercueil de plomb , et lorsque l'absoute eût été faite dans l'église de la Canourgue, on le transporta avec pompe dans celle de Maguelone, où il lui fit dresser un tombeau en marbre blanc sur lequel on voit encore l'image en relief de ce prélat revêtu de ses habits pontificaux. C'est le dernier évêque qui ait été inhumé dans cette ancienne cathédrale.

Voici les termes de son épilaphe :

De Cambous materna, dedit de Ratte paterna
Stemmata, sed virtus nobiliora dedit.
Ob decus ingenii summo splendore Tolosa
Inter sacratos vidit honore patres.
His meritis majora dédit rex signa favoris
Et Magalonenses pascere jussit oves.
Dum lupus arma parat, rapuit te pastor Olympi
Tutus ut in cœlo pascua tuta petas.
PETRUS DE RATTE generalis consiliarius regius in supreme subsidiorum senatu,
prœsulis nepos amoris, honoris et familiae splendoris causa flens posuit.

Autour du tombeau se lisent en outre ces mots :

GUITARDUS DE RATTE Monspeliensis episcopus obiit Tolosœ 1 julii anno Domini 1602, aetatis 50, pontificatus 6, R. I. P. A.

Guitard de Ratte cultivait les sciences et les belles-lettres, plusieurs écrivains lui ont dédié quelques-uns de leurs ouvrages, nous citerons Théodore Marcile qui lui dédia ses Notes sur la loi des douze tables ; Pierre Colvius, ses Commentaires sur Sidoine, Appollinaire, et le P. Sébastien Michaélis, de l'Ordre des Frères-Prêcheurs, son Traité de controverse sur l’Eucharistie. Tous ces auteurs font le plus grand éloge de la science, de la piété et de l'énergie de Guitard de Ratte.

Ce prélat portait pour armoiries : d'azur, à trois étoiles d'argent, 2 et 1.