Relation historique du siège de Montpellier en 1622 (livre) : Différence entre versions

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RELATION HISTORIOUE DU SIÈGE DE MONTPELLIER EN 1622
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BARRAU, Henri, Relation historique du siège de Montpellier en 1622, Entente bibliophile de Montpellier, 1972, 26 p.
  
Texte de M. Henri BARRA
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Préface de M. Gaston VIDAL Président de l'Entente Bibliophile
 
 
ENTENTE BIBLIOPHILE de Montpellier
 
 
 
EXPOSITION 1972 : «MONTPELLIER AU XVIIe SIECLE» Tour de la Babote
 
 
 
 
Henri BARRAU
 
 
 
RELATION HISTORIQUE DU SIEGE DE MONTPELLIER
 
 
 
EN 1622
 
 
 
Préface de Gaston VIDAL
 
 
 
Président de l'Entente Bibliophile
 
 
 
Secrétaire perpétuel de l'Académie des Sciences et Lettres de Montpellier
 
 
 
EDITION DE L'ENTENTE BIBLIOPHILE
 
 
 
Tour de la Babote
 
 
 
Montpellier
 
 
 
1972
 
 
 
 
 
 
 
A MONSIEUR FRANÇOIS DELMAS MAIRE DE MONTPELLIER
 
 
 
L'ENTENTE BIBLIOPHILE RECONNAISSANTE
 
 
 
 
AVANT - PROPOS
 
 
 
Voici, parfaitement condensé dans quelques pages, un véritable «Précis historique» de ce qui s'est passé à Montpellier sur la fin de l'an 1622, au cours du Siège mémorable que cette ville eut à soutenir paradoxalement, puisque bien française, contre les forces du Roi de France, pour être alors tombée aux mains des Protestants.
 
 
 
Ce récit, qui commémore cette année le septième cinquantenaire de ce Siège, nous le devons à la plume de M. Henri BARRAU, membre de l'Entente Bibliophile de Montpellier, et, pour le Président de cette Société, c'est une bien heureuse fortune que d'avoir à présenter un travail historique aussi admirablement documenté et ne se référant jamais qu'aux sources les plus sûres et les plus authentiques, tels les Mémoires laissés par Bassompierre ou ceux de Pontis, et tel surtout ce précieux manuscrit de la Bibliothèque Nationale intitulé : «Journal du Siège».
 
 
 
Il faut dire que notre érudit confrère a bien voulu rédiger cet ouvrage à l'occasion et pour rehausser l'éclat de la quarantième et nouvelle exposition de régionalisme que notre Société vient de réaliser à la Tour de la Babote, sur le thème, dès longtemps choisi, de «Montpellier au XVIIe siècle». Un thème qui, tout naturellement, se devait de faire concentrer notre effort évocatif sur ce fameux Siège de 1622, tant pour mémorer les heures tragiques qu'il fit endurer à nos ancêtres, que pour souligner l'importance considérable de son dénouement qui ôta à la Réforme son dernier espoir de faire basculer la France dans le Protestantisme.
 
 
 
II n'empêche que le souvenir de ce Siège, en s'estompant dans un recul de 350 années, paraissait avoir grand besoin d'être ravivé. C'est là toute la raison de ces pages, et l'un des motifs de notre Exposition.
 
 
 
 
Sur cette dernière, nous ne dirons rien, ce ne serait ici la place, ni de la commenter, ni d'en donner le moindre inventaire. Toutefois, il peut nous être permis de rappeler, sur un plus large éventail, que si nos expositions ont constamment le bonheur d'être suivies avec passion par nos concitoyens, c'est assurément en dehors de leur belle ordonnance dans un cadre exhaussé où le passé se joue sur la patine des pierres, parce qu'elles ne manquent jamais de faire surgir une foule de documents originaux : documents inconnus, tous gonflés de curieuses révélations, et normalement inaccessibles au public. Autant de pièces qu'inlassablement et à longueur d'année, l'Entente Bibliophile tâche de découvrir dans les collections particulières, les galeries ou les bibliothèques des plus anciennes maisons de notre ville, ces maisons que nous ne saurions jamais trop remercier de la bonté qu'elles ont de nous ouvrir leurs portes, comme de la confiance qu'elles nous accordent.
 
 
 
Pour revenir à la présentation de l'ouvrage de M. BARRAU, dont «le Siège est fait» et bien fait, quelques mots vont nous suffire tant la clarté de son récit le dispense de se faire accompagner par le moindre cicérone.
 
 
 
Bien fait, car, en ces temps d'apaisement œcuménique ou tout fanatisme est devenu maintenant de plus en plus difficile à entendre, c'est avec raison, sans doute, que rarement romancée, sa narration reste cantonnée dans la seule et très exacte relation des faits chronologiques, et cela sans raviver la controverse et sans poser des questions sur les causes comme sur les désirs d'hégémonie qui provoquèrent, pour la défense comme pour l'attaque de notre ville, tant de deuils avec tant de ruines.
 
 
 
On sait que la légende, sous toutes ses formes, et peu à peu, finit, comme le lierre, par recouvrir tous les vieux monuments de l'histoire, mais si elle en masque les beautés ou la prestance, elle masque aussi leurs laideurs et leurs fissures, elle vit de leur vie, aussi est-ce avec sagesse que M. BARRAU a su comprendre ici, malgré tout son désir d'exactitude, que, de ce lierre, il était peut-être bon de ne pas tout arracher pour vouloir tout expliquer.
 
 
 
 
Tout à fait en marge de cet ouvrage, mais pour essayer d'en accroître encore, et si possible; l'intérêt, nous sommes heureux de pouvoir donner, pour la première fois, une liste de personnages montpelliérains catholiques «remis en liberté» après le Siège. Bien que cette liste, très certainement, ne comprenne que les catholiques les plus notables, elle n'en constitue pas moins un document des plus rares pour se situer dans une période de notre histoire où, à cause de la totale destruction des registres de paroisse, les éléments constitutifs de notre population sont très mal connus.
 
 
 
Cette liste se trouve dressée à la première page d'une pièce notariée, encore inédite, que nous possédons. Sur cet acte, daté du 4 janvier 1623, les habitants catholiques, dont nous allons donner l'exacte énumération, se trouvent alors réunis, convoqués par l'évêque, pour adresser à Louis XIII une supplique en vue d'obtenir que le Consulat-major de la Ville leur soit rendu. Cela, disent-ils, afin d'éviter que Montpellier ne retombe en «semblables malheurs, souffrances et horribles sacrilèges» :
 
 
 
Sont «Assemblés avec Monseigneur l'Evesque de Montpellier (de Fenouillet), MM. de Cezaire, de Solas, de Grille, de Castries, de Murles, de Bon, de Saint-Georges, de Plantade, d'Almeras, de Grasset, de Archidialvi, de Gramond, Chaulvi, de St-Panoux, de Trinquât juge Mage, de Gallian, de Clair, de Montaigne, d'Assas, de Bolgair, Grasset juge, La Clotte, de Beauxhostes, de Surville, de Candil-largues, Varanda, de Lacroix, de Robin, Ratte, Clair, Paul Declair, de Girard contrôleur, de Massilan, Brémond, Tondut (notaire), Darenis, Grasset, Baugut, Vignes, Rignac, Rolin, Carbonnier, Casseyrol, Gauchiers, Palgues, Gaillard, Gon-dans, Gentil, Recolin, Rosselli, Dalichou, Angarran, Galois, Lionesque, Rocques, Vincens, Cassan, Roujan».
 
 
 
Quelle étonnante constatation de pérennité, après un pareil laps de temps, ne peut-on faire en retrouvant sur cette liste autant de noms montpelliérains qui ont illustré ou illustrent encore notre cité ; d'autant que certains de ces personnages, tels MM. de Saint-Georges, d'Assas ou de Coussergues, restent encore voilés, pour nous, sous une appellation purement foncière.
 
 
 
 
C'est ainsi, et par ailleurs, que, dans le texte qu'on va lire, on trouvera deux gentilshommes semblablement désignés par le seul nom de leur fief, mais sur leur compte, nous sommes plus heureux et allons pouvoir en préciser l'identité. Il s'agit de ce Chevalier de Fabrègues et de son frère le Maistre de Camp qui trouvèrent la mort, l'un comme l'autre, dans l'assaut si meurtrier qui fut donné le 2 septembre contre le plateau Saint-Denis. Le premier, le Chevalier, c'est Jean de SARRET alors âgé de 38 ans, qui était Chevalier de Malte, l'autre, son frère aîné c'est Henri de SARRET, âgé de 45 ans, capitaine, châtelain de Pézenas, époux de Marie de CALANDON, il était père de deux enfants. C'est par lui que cette illustre maison a pu se prolonger jusqu'à nos jours. ( A. CHERON et G. de SARRET : «Une Seigneurie en Bas-Languedoc : Coussergues et les Sarret» Bruxelles 1963 - Chapitres. IV et V)
 
 
 
Cette préface ne saurait s'achever sans qu'éclate maintenant, sur ses dernières lignes, place qui nous a paru la plus déférente, nos sentiments d'immense gratitude envers M. le Maire de Montpellier, envers la Municipalité de cette ville, comme aussi envers ses imprimeurs ; tant il est vrai que sans eux, sans l'aide aussi précieuse que bienveillante qu'il leur a plu de nous apporter, jamais, bien certainement, cette Relation historique n'aurait pu voir le jour.
 
 
 
Gaston VIDAL
 
 
 
 
 
 
 
 
RELATION HISTORIQUE DU SIÈGE DE MONTPELLIER EN 1622
 
 
 
Voici quelques années, un étonnement mêlé de curiosité saisit bien des montpelliérains. A l'angle que forme la place Edouard-Adam avec la Grand'Rue Jean Moulin et où lai mise en place d'un transformateur avait nécessité de creuser le sol, s'offraient à la vue, disposés en pyramide au cœur du trottoir, des boulets de fer, d'assez beau calibre, certes, et dans un état de conservation satisfaisant.
 
 
 
On ne fut pas long à les identifier comme étant de tangibles vestiges du siège mémorable que Montpellier eut à soutenir en 1622 : Un approvisionnement probable pour la défense de l'ancien bastion de la Saunerie, situé près de la porte du même nom, aujourd'hui disparue, elle aussi.
 
 
 
Ces boulets, témoins émouvants d'une époque parmi les plus tourmentées qu'ait eu à connaître notre Ville, sont maintenant visibles dans une salle de la tour de la Babote, où ils ne pouvaient que constituer une pièce de choix pour la présente exposition. (Exposition réalisée en octobre 1972 sur :« Montpellier au XVIIe siècle »)
 
 
 
En ce début du XVIIe siècle, on le sait du reste, mais il n'est pas inutile de le rappeler, la France en plusieurs de ses régions, se trouvait secouée sporadiquement -et depuis plusieurs décennies- par les tragiques épreuves des guerres de religion dont nous concevons mal, de nos jours, qu'elles aient jamais pu se produire.
 
 
 
Au départ, des quiproquos, des entêtements, la peur surtout, devaient, de part et d'autre -notre ville ne fut pas l'exception- fournir un aliment de poids à la dégradation irréversible d'une situation qui n'allait pas tarder à déboucher sur la guerre civile, la plus triste, la plus terrible de toutes.
 
 
 
Mais aussi, la rectitude, la noblesse des parties en cause, aux termes de maux jugés irréparables, permit à Montpellier, une fois les armes déposées, l'apaisement définitif des esprits, car sur les exactions, qu'une minorité n'avait pas hésité à commettre, telle la destruction de toutes nos églises, le souvenir s'estompa peu à peu sans laisser de trop cuisantes marques dans les cœurs.
 
 
 
Quant aux remarquables fortifications dont Montpellier avait su s'entourer en prévision d'événements graves -qui devaient, hélas ! se produire- elles ne furent démantelées que par l'autorité supérieure, . Cette ceinture de bastions, de ravelins, aisément visibles sur les plans qu'expose «l'Entente Bibliophile», se révéla, en effet, quasiment intacte lors de la reddition de Montpellier qui pouvait, à bon droit, être iqualifiée «imprenable ».. Le siège de 1622, en vérité, s'il n'avait connu que le seul affrontement des armes, eût pu durer fort longtemps.
 
 
 
Auparavant, entre 1560 où le protestantisme avait commencé à être prêché à Montpellier et 1621, protestants et catholiques, malgré de cruelles frictions, purent cohabiter ou, à tout le moins, coexister.
 
 
 
En 1561, les protestants s'étaient emparés de Notre-Dame-des-Tables (alors édifiée sur l'actuelle place Jean-Jaurès).
 
 
 
Cette même année, Saint-Pierre fut pillé ainsi que, peu après, la soixantaine d'églises et de chapelles de Montpellier.
 
 
 
Dirigés par le comte de Crussol, les protestants s'organisaient, levaient des troupes ; ils firent «abattre et ruiner » tous les faubourgs et édifices hors la ville, qui n'en constituait pas moins plus de la moitié de Montpellier ; 25 couvents, monastères et églises furent ainsi rasés pour renforcer la sécurité et la défense, dans la crainte que la ville ne fût assiégée par les troupes royales. C'est ce qui se produisit en juin 1577 où accompagné du Duc de Joyeuse, Damville mit le siège devant Montpellier. Heureusement, dès le 1er octobre de la même année, la paix intervint et le siège fut levé ; mais les privations avaient été dures. Avec la paix,
 
 
 
 
 
 
 
Montpellier et Aigues-Mortes devenaient «villes de garantie» pour les protestants. Ceux-ci s'employèrent à en bien fortifier les portes et devant la plupart, furent installés en 1598, des ponts-levis.
 
 
 
«Les protestants, organisés en parti politique» -écrit M. VIGIE (Dans son ouvrage sur «Les enceintes successives de Montpellier et de ses fortifications publié en 1899.) suivant l'ordre général, établi par l'assemblée de la Rochelle, ne se contentaient plus d'institutions spéciales servant de garanties à la liberté religieuse, ils voulaient le maintien d'une organisation politique, administrative et militaire, fonctionnant en dehors de la hiérarchie nationale. La levée du siège de Montauban en 1621 avait exalté encore leurs prétentions.
 
 
 
«Henri II de Bourbon, prince de Condé, décida le «roi à la guerre contre les protestants. L'année 1622 fut «marquée pour le roi, par une série d'entreprises contre les «localités occupées par les protestants.
 
 
 
«Le siège de Montpellier, terminé par la capitulation «de la Ville fut l'événement le plus important de l'année».
 
 
 
«A Montpellier, les protestants, poursuit M. VIGIE, dominaient complètement ; l'organisation administrative et militaire avait été établie suivant l'ordre général ; le duc de Rohan avait été nommé général en chef des armées pour le bas-Languedoc, et bientôt gouverneur de la ville par le Conseil Général de Montpellier. Le Consistoire, avec les consuls de la cité, allait prendre la direction des affaires».
 
 
 
L'administration de notre ville était formée d'un Conseil de Ville (24 membres) et de Consuls élus ; l'administration des Seigneurs de la Commune Clôture (au nombre de 7) et les Consuls de mer se trouvaient sous leur direction.
 
 
 
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Montpellier renforça ses fortifications, grâce au talent de M. d'ARGENCOURT qui, pour cela, quitta le service du duc de GUISE et vint dans notre ville, qui était sa ville natale, en avril 1621. Il «fit démolir les faubourgs et jardins» aux environs de la cité et entreprit de fortifier celle-ci de tous côtés. Travail considérable, exécuté à grands frais supportés par les habitants (le Journal du siège de Montpellier (Dont le manuscrit se trouve à la Bibliothèque Nationale.) parle de 300 000 écus). En un an, Montpellier était cernée «de 16 bastions, tenailles ou demi-bastions, tous attachés de courtine, environnés de fossés avec la contrescarpe terrassée, plusieurs demi-lunes et cornes bien accommodées, le tout avec telles dispositions, -poursuit le Journal du siège- qu'au jugement de ceux qui s'y entendent, si ces fortifications étaient en leur perfection, il n'y aurait ville plus forte en la chrétienté...».
 
 
 
Cette construction fut facilitée par la démolition des églises, monastères et maisons des faubourgs qui en fournirent les matériaux. Les habitants valides furent «requis», ainsi que des soldats ; les Consuls signèrent des contrats d'entreprise pour les travaux les plus importants. Montpellier, bien administrée, dispose de vivres, de ressources indispensables ; l'artillerie eut ses munitions, les troupes purent être logées, les médicaments ne manquèrent pas. «On eut le moyen, écrit le Journal du Siège, de serrer dans la ville une quantité de blé suffisante pour soutenir un siège de deux ans ».
 
 
 
Pendant le siège, le duc de ROHAN ne séjourna pas à Montpellier mais il y laissa son cousin, le baron de CA-LONGE en qualité de lieutenant ; au défaut de celui-ci; M. d'ARGENCOURT prendrait le commandement : tous deux furent «directeurs généraux» avec deux civils, MM. d'AIME-RIC et DUPUY. Tels furent les «chefs», les animateurs de la résistance montpelliéraine. ROHAN y laissa aussi le régiment du baron des PLANTIERS, formé seulement de quatre compagnies et commandé par M. de la ROQUE de GASQUES. Puis vient le régiment de M. de SAINT-COSME de cinq compagnies. M. MESTRE eut un régiment de cinq compagnies également, un autre semblable échut à M. de LERS, neveu de CALONGE. Ces compagnies étaient composées d'étrangers ; en outre, huit ou dix «étaient placées aux quartiers, selon la nécessité et recevaient l'ordre de celui qui commandait». Trois régiments, de six compagnies chacun, furent formés par des habitants de Montpellier et dirigés respectivement par M. de CARLENCAS, M. de MAZE-RAN et M. de SAUSSAN.
 
 
 
On prétend même qu'il y aurait eu une compagnie de femmes, mais les avis restent partagés à ce sujet ; cent vingt Montpelliéraine s dit-on «prirent le chapeau et l'épée».... On sait seulement qu'une jeune fille de quinze à seize ans, prit une pique et en larda un ennemi ; également qu'une grenade blessa deux jeunes filles dans un bastion ; enfin qu'une Montpelliéraine tua un soldat adverse avec sa propre dague...
 
 
 
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M. de ROHAN avait préparé les conditions de la paix avec le connétable de LESDIGUIÈRE. « Tous les articles, écrit M. VIGIE (op. cit.), en avaient été acceptés par Louis XIII. Cependant comme le prince de CONDÉ avait répandu le bruit que Montpellier serait pillée, les pourparlers furent rompus et les habitants de Montpellier refusèrent l'entrée du roi dans la Ville ne voulant recevoir que le connétable de LESDIGUIÈRE en vue de l'établissement de la paix. Là dessus un conseil de guerre se tint à Lavérune le 29 août 1622.
 
 
 
Avec le Roi se trouvaient à ce conseil: M. le Prince, M. le Connétable, les maréchaux de PRASLIN, SAINT-GERAN et CRÊQUY, MM. d'EPERNON et de MONTMORENCY, SCHOMBERG, BASSOMPIERRE, MARILLAC , ZAMET, VALENÇAY, PORTES, MONTRÉAL, le président FAUR et le conseiller d'Etat M. BULION, Ce dernier dressa le rapport et conseilla au Roi d'accepter les conditions des montpelliérains. Mais BASSOMPIERRE, approuvé par le prince de CONDÉ, s'opposa à l'opinion de BULION, que partageaient cependant les autres conseillers.
 
 
 
Le parti de la violence fut le plus fort. Dès lors, les ordres d'investir la place n'allaient pas tarder.
 
 
 
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Les ressources royales n'étaient pas minces. Qu'on en juge : le régiment des gardes françaises ; les régiments de Piémont, de Navarre, de Picardie -vieux corps d'armée -le régiment de Normandie ; ceux recrutés dans la province en prévision de la campagne (Régiments Des Portes, de la Roquette, d'Estissac, de Fabrègues, de Saint-Brest, de Massargue et de Saint Chaumont) ; un corps de Suisses, 300 lansquenets et 300 volontaires.
 
 
 
La cavalerie ne comprenait que quelques gendarmes et les trois compagnies de chevau-légers de la Reine Mère, de la Reine et de M. le Prince. L'artillerie disposait de 43 pièces de canon qu'on avait acheminées par le Rhône en juillet.
 
 
 
L'armée royale était donc forte de dix à douze mille hommes dirigés par le prince de CONDE, Henri II de BOURBON, sous les ordres de qui étaient placés : Charles de CHOISEUL, marquis de Praslin, maréchal de France ; Jean-François de la GUICHE, sieur de Saint-Géran, maréchal de France ; CHARLES, sire de Créquy, duc de Lesdiguière, maréchal de France ; Bernard de LA VALETTE, duc d'Epernon, chevalier des ordres du Roi, colonel général de l'infanterie française ; Henri II, duc de Montmorency et de DAMVILLE, gouverneur du Languedoc.
 
 
 
Puis : François de BASSOMPIERRE, colonel général des Suisses, qui fut nommé maréchal à la fin du siège ; Henry de SCHOMBERG, comte de Nanteuil et de Duretal, marquis d'Epinay, qui sera maréchal de France en 1625 ; Louis de MARILLAC ; ZAMET, maréchal de camp ; le duc d'HELWIN, commandant les lansquenets et les volontaires ; MONTRÉAL, maréchal de camp du duc de MONTMORENCY ; le marquis des PORTES ; M. de VALENÇAY, maréchal de camp ; DUPLESSIS, sergent de bataille ; ainsi que les ingénieurs GAMORINI, le MAYNE de CHABAND et un jeune homme de 18 ans, Biaise FRANÇOIS, comte de Pagan.
 
 
 
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Le 30 août, une reconnaissance des abords de Montpellier fut faite par le connétable de LESDIGUIÈRE avec le maréchal de PRASLIN. Il y eut quelques blessés...
 
 
 
Le 31 août, les coteaux, depuis la route de Ganges jusqu'à Castelnau, furent occupés par l'armée royale. Louis XIII établit son quartier général au mas de Méric qui appartenait au premier consul de Montpellier (on y édifia une tour qui permettait de suivre toutes les opérations).
 
 
 
Le prince de CONDE occupa la métairie du conseiller MADRONET et, en avant, campèrent les gardes françaises, les régiments de Navarre, de Piémont, de Normandie.
 
 
 
Le mas de Las Bosses abritait le quartier général du duc de MONTMORENCY, et devant, se trouvaient avec le Royal Picardie, les régiments levés dans la province.
 
 
 
Le marquis de Saint-Chaumont et les troupes du Lyonnais occupèrent le Pont Juvénal, fortifié, ce qui permit de surveiller la route de Nîmes et des Cévennes. Par suite du manque de cavalerie, seul le nord de la Ville fut investi.
 
 
 
Il y eut des escarmouches, -pour commencer...
 
 
 
Le 1er septembre, un conseil de guerre fut tenu chez le roi ; la décision fut prise de s'emparer de «l'aire Saint-Denis» (où devait être édifiée, plus tard, la Citadelle); c'était un point stratégique important. PRASLIN et BASSOMPIERRE s'y établirent sans peine et commencèrent à fortifier les lieux.
 
 
 
Le lendemain, d'ARGENCOURT de son côté, fit réunir un conseil de guerre et demanda fortement que fussent délogés les assiégeants. Pour ce faire, trois troupes formant une infanterie de 300 hommes et 50 volontaires furent mises sur pied ; la première (de mousquetaires), menée par le Capitaine TARAVELIER, l'autre par le capitaine ATGER, le reste (avec les 50 volontaires) par M.de SAUSSAN, M. de CALLONGE partit avec 25 ou 30 mestres de cavalerie et fit sonner la charge. Le canon de Montpellier donna dans la redoute des ennemis. Une charge furieuse eut lieu, la troupe du roi eut d'abord le dessous, Mais les seigneurs qui se trouvaient auprès de Louis XIII partirent se joindre au combat : le duc de MONTMORENCY y reçut deux coups de pique et BASSOMPIERRE, après avoir ordonné aux Suisses de reprendre les armes, redevint maître de la situation.
 
 
 
 
 
 
 
Les troupes royales conservèrent le plateau, le 3 septembre, puis l'abandonnèrent le 4 car elles ne pouvaient ni s'y loger, ni s'y établir. Mais cette «affaire du 2» avait permis à des êtres courageux de s'illustrer, -tels M. de CARLENCAS qui, bien qu'âgé de 78 ans, se mêla aux soldats, «l'épée au poing» et les harangua. On eut à déplorer des morts ; dans les rangs de Louis XIII : le duc de FRON-SAC, âgé de 17 ans, «jeune prince de très grande espérance», en qui on voyait un futur «grand capitaine» ; le marquis de BEUVRON ; les mestres de camp Fabrègues et Saint-Brest ; le marquis de Canilhac ; le chevalier de Fabrègues, frère du mestre de camp ; M. de LARDIN, gendre de SAINT-BREST ; LUSSAN l'aisné ; le sieur d'OUCTOT, lieutenant de la compagnie de M. le Prince ; M. de CHAUDIEU, sous-lieutenant de Champagne, gendarme de M. le Prince ; M. le Chevalier de Ribautte ; M. le Baron de MONBRUN, fils de M. le Vicomte de LESTRANGE.
 
 
 
Le Journal du Siège déclare en outre, que parmi les morts se trouvaient «plusieurs autres personnes de qualité dont on n'a pu apprendre les noms». D'autres membres de l'armée royale périssent, notamment M. de COMBALET, neveu du connétable de LUYNES.
 
 
 
Quant aux assiégés, ils perdirent, entre autres, les capitaines AZEMAR, TARAVELIER et TALLAN, ainsi que trois soldats.
 
 
 
BASSOMPIERRE dans son Journal de ma vie, tout comme le Journal du Siège de Montpellier signalent la noblesse de sentiments de M. d'ARGENCOURT qui, voyant le duc de MONTMORENCY s'avancer hardiment «au milieu des gens de la Ville» le prévint, l'avertit du danger, ce qui lui épargna une mort certaine (il ne fut blessé, comme nous l'avons dit que de deux coups de pique).
 
 
 
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Voici donc les montpelliérains de nouveau maures de l'aire Saint-Denis, véritable clef de la Ville, selon BASSOMPIERRE qui ajoute, non sans un compréhensible dépit :
 
 
 
«...les ennemis, à nostre barbe, y bastirent un fort». Il est bien vrai que le lieu fut admirablement fortifié, au point qu'un siège sévère et l'aide de l'artillerie s'avéreront nécessaires, quelques mois plus tard, pour en venir à bout...
 
 
 
Les troupes du Roi vont alors attaquer Montpellier par le Nord, entre la porte des Carmes (qui se trouvait au bas de l'actuelle rue du Cardinal de Cabrières) et le Pila-Saint -Gély.
 
 
 
Face à elles : le mur de la Commune Clôture, le fossé de la ville et les nouvelles fortifications dues à M. d'ARGENCOURT, à savoir : le bastion n° Ides Tuileries ou des Carmes, appelé aussi bastion blanc ; le bastion n° 2 dit Bastion de la Blanquerie ou de Calonge, du nom de l'officier qui en avait dirigé l'édification, et encore bastion noir ou bastion vert ; entre les deux : le Ravelin du Ribeiran ou la demi-lune d'Argencourt. Devant ces ouvrages, étaient un fossé et un chemin que protégeaient des cornes (terrassements). Une tenaille palissadée se trouvait à l'extrémité de la pointe du bastion de la Blanquerie, donc, comme le souligne M. VIGIE, «en avant du campement des troupes royales».
 
 
 
Ces fortifications étaient formidables, ce dont ne se rendaient nullement compte les assiégeants qui eurent, de ce fait, à soutenir un siège difficile et qui étaient très loin d'avoir vaincu tous les obstacles quand la Ville se rendit. PONTIS, dans ses Mémoires bien intéressants, exprime «son grand étonnement» (au sens fort que ce mot revêtait, à l'époque) face à ces travaux titanesques, «ne pouvant presque en croire mes yeux».
 
 
 
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Les troupes royales préparèrent l'attaque de ces fortifications, côté nord, «par des cheminements protégés au moyen de gabions, de barriques remplies de terre», par des tranchées menées jusqu'au bord du fossé et des ouvrages de défense. Des batteries de canons furent établies, destinées à bombarder les ouvrages à attaquer.
 
 
 
On n'employait pas, alors, une artillerie spéciale pour les sièges mais des canons d'un calibre moyen ; les obusiers à bombes étaient encore inconnus.
 
 
 
Néanmoins, les assiégeants disposaient d'une artillerie de beaucoup supérieure à celle des montpelliérains. Les bombardements firent subir aux murs de la Commune Clôture certes quelques dégâts, mais relativement peu importants.
 
 
 
Nous savons, grâce au Journal du Siège, combien de coups de canon furent tirés sur les fortifications et sur Montpellier. Le compte paraît scrupuleusement tenu à jour : 86 coups le 8 septembre ; 114 le 9 ; 107 le 10 ; 87 le 11 ; 69 le 12 ; 250 le 13 ; 178 le 14 ; 219 le 15 ; 58 le 16 ; 29 le 17 ; 138 le 18 ; 63 le 19 ; 1101 coups le 20 septembre, un record, mais qui sera encore dépassé ! 676 coups le 21 ; 339 coups dans la journée du 22 septembre et 43 la nuit ; 129 coups durant la journée_du23 septembre et 38 la nuit ; 279 coups le 24 ; 197 le 25 ; 217 le 26 ; 223 le 27 ; 236 le 28 ; 324 le 29 ; 198 le 30 ; 357 le 1er octobre ; et, point culminant, 1200 coups le 2 octobre ; 294 le 3 octobre ; 359 le 4 ; 246 le 5 ; 133 le 6 ; aucun coup le 7 ; 136 coups le 8 ; 149 le 9 (à 11 h du soir) ; 297 coups le 10 octobre. Puis vint la trêve annonciatrice de la paix.
 
 
 
Les canonnades dont nous venons de donner la sèche énumération chiffrée, à chaque fois ponctuaient des attaques ; le 13 septembre les troupes royales s'en prirent à l'ouvrage extérieur palissade en avant du bastion de Calonge et purent pénétrer sur les cornes des fortifications. Ce succès grisant eut pour résultat de faire croire la partie gagnée, -et de ralentir les travaux des tranchées.
 
 
 
Dès le 16 septembre, au lieu de diriger les attaques uniquement à droite vers les bastions des Tuileries et à gauche vers celui de Calonge, on décida, pour les joindre, d 'attaquer le ravelin du Ribeiran (ou demi-lune d'Argencourt) sis entre les deux bastions. Mais, les troupes du Roi, le 24 septembre sont repoussées dans cette attaque et une nouvelle tentative le 2 octobre (qu'on se rappelle les 1200 coups de canon ! ) subit un semblable échec.
 
 
 
De nouveaux travaux allaient être entrepris lorsque la trêve se produisit, à laquelle n'allait pas tarder à succéder la paix. Louis XIII, nous le verrons, entra triomphalement
 
dans Montpellier, -une ville qui ne lui était pas foncièrement hostile-, sans l'avoir vaincue !
 
 
 
Mais nous anticipons, reprenons plus en détail le fil des péripéties de ce siège selon principalement le Journal manuscrit de la Bibliothèque Nationale : du 3 au 14 septembre, les assiégeants creusèrent des tranchées d'approche ; à leur gauche, face au bastion de Calonge ou bastion Noir ; à leur droite, quartier de Montmorency, face au bastion des Carmes ou des Tuileries (Bastion blanc). Ils avançaient leurs gabions, dressaient des retranchements, démasquant des batteries destinées à «ruyner la redoute».
 
 
 
Mais les coups de canon ne faisaient que renforcer le zèle et l'ardeur des assiégés : ceux-ci disposaient d'artillerie à l'emplacement actuel du Peyrou, une autre batterie avait été établie au bastion Saint-Denis.
 
 
 
Les assiégés tentèrent (et réussirent) plusieurs sorties, deux en particulier, les 3 et 8 septembre.
 
 
 
Le 3, du côté du Peyrou, ils repoussèrent les assiégeants vers la Font-Putanelle ; ce fut la débandade parmi les troupes royales.
 
 
 
« - Soldats, vous fuyez ! cria ZAMET aux siens
 
 
 
- Maréchal, nous n'avons plus de poudre ni de plomb !
 
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- Quoi ! N'avez-vous pas l'épée et les ongles ! »
 
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Fortes paroles dignes d'un grand capitaine. Précisons que ZAMET remplaçait MONTMORENCY blessé.
 
 
 
Dix-huit soldats de Montpellier furent tués ou blessés; les troupes royales, selon toujours le Journal du Siège, perdirent plus de 100 hommes, «sans compter ceux que le canon du Peyrou tua, qui tira 7 à 8 coups sur eux, heureusement toujours et avec rencontre». ZAMET lui-même, reçut une blessure grave dont il mourut cinq jours plus tard, pleuré de tous les assiégeants, mais non des Montpelliérains qui l'avaient surnommé le «grand Mahomet» depuis la journée des Moissonneurs (24 juin 1622) où il «avait fait le dégât et bruslé les blés».
 
 
 
 
 
 
 
La sortie du 8 revêtit une grande importance. Elle eut lieu vers les 9h du soir et fut dirigée contre les retranchements situés entre la redoute du bastion de Calonge (où se trouvaient notamment d'ARGENCOURT et 200 hommes) et la gabionnade du clos de Mignot. Attaque brusque, menée par trois groupes d'assiégés.
 
 
 
BASSOMPIERRE, à son accoutumée, narre l'événement de façon vivante et pittoresque. L'un de ses suivants, DESCHAMPS, s'étant rendu avec lui à la gabionnade déjà aux mains des assiégés, fut surpris de voir celle-ci attaquée : «Mordieu ! que faites-vous ? cria-t-il aux soldats (croyant qu'il s'agissait des troupes du Roi) ; vous rompez notre barricade ! » Plusieurs coups d'épée lui répondirent et il eût été tué immanquablement s'il n'avait eu la présence d'esprit de s'écrier : «Je suis BASSOMPIERRE ! il y a vingt mille écus à gagner ! » Ce qu'entendant, les ennemis le firent prisonnier, aussi le bruit courut-il, sur le moment, que le vrai BASSOMPIERRE était aux mains des Montpelliérains.
 
 
 
Les assiégés, écrit encore BASSOMPIERRE, «nous vinrent taster sur le minuit et à 4 heures du matin encore, mais ils trouvèrent toujours à qui parler». De toute manière, les sorties se multiplièrent et furent, le plus souvent, fructueuses. Les jours suivants, notamment le 12 septembre, on renforça les fortifications. Le 16, une batterie royale fut établie vis-à-vis la porte des Carmes et, le' 20 septembre, 16 canons furent mis en batterie entre le bastion des Carmes et celui de Calonge, en face delà demi-lune d'ARGENCOURT (ils tirèrent 1101 coups...)
 
 
 
Les assiégés s'efforçaient aussi de ruiner l'artillerie royale mais il ne possédaient pour cela que quelques pièces , A Saint-Pierre, ils avaient entreposé des arquebuses «à croc» «qui allaient chercher les ennemis dans leurs tranchées et dans leurs bastions».
 
 
 
Des retranchements formidables s'édifièrent les jours suivants : au bastion de Calonge, à la demi-lune dans laquelle une mine fut entamée afin d'«éventer celles que l'ennemi faisait de son côté».
 
 
 
 
 
 
 
Dans la nuit du 24 septembre, les troupes royales se décident à attaquer après avoir gagné la pointe de la demi-lune à la sape, tiré 22 coups de canon et sonné la charge à la trompette ; revêtues de chemises blanches, elles se préparent à l'assaut, mais, face à la résolution des assiégés et à leurs mousquetades dirigées par le capitaine ATGER qui était de garde, elles se retirent après trois tentatives et après avoir seulement lancé quelques grenades.
 
 
 
Les assaillants continuent de creuser des tranchées (les tonneaux, très nombreux, dont ils disposent, les aident dans leur travail) ; ils établissent une nouvelle batterie de cinq pièces, le 29 septembre. Un orage éclate cette nuit-là, le Merdan^on déborde, détruit les tranchées proches et noie une centaine de lansquenets.
 
 
 
Des escarmouches, cependant, se produisaient chaque jour; on se battit même à coups de pierres, le 27 notamment, où le capitaine ATGER fut blessé et où une jeune fille, nous l'avons dit, «voyant un des ennemis qui montait sur la pointe de la demi-lune, prit une pique et lui en donna, dans le corps. Les autres, ajoute le Journal «lu Siège, achevèrent de le tuer ».
 
 
 
Nouvel orage le 1er octobre. Le 2, un dimanche, les assiégeants se résolurent à une attaque préparée de longue main. Arriva donc, très tôt, le maréchal de PRASLIN. Accompagné du cardinal de LA VALETTE, de CHEVREUSE et d'EPERNON, le prince de CONDÉ vint examiner la situation; l'espoir l'avait gagné, à la différence de BASSOMPIERRE qui, non sans raison, supputait l'ampleur et la qualité des ouvrages fortifiés de la Ville. Nouvel assaut vers les 4 ou 5 heures du soir, repoussé lui aussi grâce à la maîtrise des assiégés : M. de MESTRE, M. des ISLES et des volontaires, M. de CALONGE, le capitaine AYMON (qui, avec quelques compagnons, devait lancer jusqu'à 60 grenades ! ) ; les ennemis furent même pourchassés et tués «jusques à la bouche des canons où ils allaient chercher asile».
 
 
 
Echec des assiégeants, donc, mais pertes notables dans les deux camps : trois ou quatre cents tués chez le Roi, -dont ROQUELAURE, les capitaines SERAUS et FRENEL avec de nombreux blessés...
 
 
 
Ce 2 octobre restera, dans les annales, comme le plus dense du siège et l'on en retiendra sa formidable canonnade, sa multitude de morts et l'impossibilité, pour les troupes royales, de venir à bout de la Ville.
 
 
 
Dès lors, à dater de ce point culminant des combats, les événements vont languir quelque peu et leurs péripéties ne plus offrir qu'un relief émoussé, dont l'affaiblissement ira croissant... Certes, les assiégeants ne se privèrent pas de tirer à pleins boulets sur les murailles : la tour des Carmes reçut, en tout, à elle seule, 1200 projectiles et pourtant le double de ce nombre eût été nécessaire pour la démolir car elle présentait seulement une large brèche ! des escarmouches éclataient encore parfois.
 
 
 
Cependant, du côté du Roi, on se préparait à reprendre une lutte ardente. Face à l'échec du 2 octobre, le prince de CONDE convoqua un conseil de guerre où il déclara -selon BASSOMPIERRE- que «si l'on n'avait pu prendre un petit ravelin, on prendrait bien moins Montpellier et qu'il fallait aviser»... Cependant Louis XIII venait de recevoir un renfort de 4 000 hommes de pied et 500 chevaux qu'amenait le connétable de LESDIGUIÈRE.
 
 
 
Le 8 octobre, grand conseil de guerre. ROHAN arrive le 10 à Montpellier avec une escorte fournie par le maréchal de CREQUI et les discussions sur les conditions de paix vont, ainsi, s'entamer entre le quartier général et la ville de Montpellier.
 
 
 
Elle fut, enfin signée, le mercredi 12 octobre, cette trêve tant souhaitée, suspension d'armes où pour reprendre les propres termes si pittoresques d'un témoin oculaire, MARILLAC, dans une lettre qu'il adressait au cardinal de RICHELIEU , «des tranchées aux bastions, les assaillants et les assaillis se sont découverts les uns aux autres, changeant leurs injures en belles paroles et leurs mousquetades en verres de vin...».
 
 
 
«La trêve continuant, écrit, quant à lui, le Journal du Siège, on parut librement sur les bastions et remparts pour parler avec les ennemis qui, de leur côté, se montraient assez et ne témoignaient pas moins d'aise et de contentement que nous de l'espérance delà paix».
 
 
 
 
 
 
 
On commença donc à fraterniser, non sans dignité... ni prudence.
 
 
 
«Le parti de la sagesse et de la modération l'emporta dans les conseils de la ville », estime avec raison M. VIGIE (op. cit.) qui ajoute : «...la population accepta avec bonheur la fin de la guerre». Certes, quelques exaltés tentèrent de provoquer une sédition en ville, mais celle-ci fut apaisée par la fermeté et l'habileté de M. de CALONGE. Sans tarder, la population se mit en devoir de recevoir Louis XIII «de la manière la plus convenable». «On n'eut pas le moyen, nous apprend le Journal du Siège, de lui préparer une entrée honorable, mais Sa Majesté pouvait juger, par les bénédictions et les cris de liesse (...) et par le contentement et le respect qu'elle voyait aux visages des habitants, les vœux de leur fidélité et l'obéissance qu'ils doivent à son service ».
 
 
 
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Les assiégés avaient fait preuve d'un indomptable courage , n'ayant jamais ralenti leur acharnement à détruire ou mettre en péril l'oeuvre, sans cesse renaissante, des troupes royales et repoussé toujours avec ténacité leurs multiples assauts. D'ARGENCOURT avait été admirable dans la défense. Au point que Louis XIII, le lendemain même de son entrée à Montpellier, voulut visiter ces fortifications imprenables et inviolées, «belles et régulières» selon André DELORT et il eut à cœur d'en féliciter le /naître d'œuvre, d'ARGENCOURT lui-même, ingénieur génial dont il devait bientôt s'attacher les services. RICHELIEU lui marqua son estime et lui confia des tâches de la plus haute importance, en rapport avec ses capacités, notamment le plan des fortifications de Brouage, cette étrange et émouvante cité. En 1637, il fut élevé au grade de maréchal de camp.
 
 
 
Auréolés de gloire, les assiégés furent traités en frères d'armes par les vainqueurs.
 
 
 
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Ce siège eut un retentissement considérable. Après l'échec de celui de Montauban, la capitulation de Montpellier assurait l'autorité et le prestige du Roi. Louis XIII tint à faire frapper une médaille commémorative qui perpétuerait le souvenir de cette page d'Histoire. La pièce porte, au droit, l'inscription que voici :
 
 
 
LVDOVICVS XIII. FRANCORVM. ET. NAVARRE. REX. ;
 
 
 
et au revers :
 
 
 
ARMIS. ET. CLEMENTIA. VICTOR.
 
 
 
On ne pouvait trouver formule plus simple, ni plus éloquente...
 
 
 
Mais hélas ! les belles fortifications édifiées par les protestants dans le but de soutenir le siège devaient être détruites ; ainsi l'exigeait l'acte de capitulation et ainsi fut fait.
 
 
 
Soldats et habitants, aussi bien de Montpellier que des localités voisines^, durent s'employer sans tarder à cette besogne. Seuls demeurèrent debout les murs bien antérieurs au siège de la Commune Clôture, les bastions du Peyrou avec la Tour des Pins, ceux de la Saunerie et ceux de Lattes que dominait la Tour de la Babote !
 
 
 
 
 
 
 
En 1622, après le siège de la ville d Montpellier tenue par les Protestants, le Roi Louis XIII fit construire une citadelle pour pouvoir tenir la ville en échec en cas de nouvelles rébellions.
 
 
 
Cette citadelle fut construite avec rapidité de 1624 à 1626. Par la suite, elle servit de prison et de casernement.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Tiré sur les Presses Municipales
 
 
 
2ème trimestre 1972
 
 
 
MONTPELLIER
 

Version actuelle datée du 1 janvier 2019 à 12:01

BARRAU, Henri, Relation historique du siège de Montpellier en 1622, Entente bibliophile de Montpellier, 1972, 26 p.