Georges-Lazare Berger de Charency : Différence entre versions
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Biographie selon Fisquet
Georges-Lazare Berger de Charancy naquit le 24 octobre 1689, à Autun, du mariage de René Berger, seigneur de Charancy, paroisse de Saint-Didier-sur-Arroux, archiprêtré de Luzy, en ce diocèse, et de Jeanne Dubled. Il fît ses études à Paris chez les Sulpiciens, et reçut la tonsure le 18 décembre 1707, et les ordres mineurs le 22 décembre 1709. Le sous-diaconat lui fut conféré le 30 mai 1711, le diaconat dans le courant de 1713, et enfin la prêtrise le 17 mars 1714. Successivement grand-chantre, archi- -diacre et chanoine de la cathédrale de Meaux, vicaire général du cardinal de Bissy, évêque de ce diocèse, il fut nommé, au mois de mars 1735, à l'évêché de Saint-Papoul, dont Jean-Charles de Ségur s'était démis le 26 février précédent. Préconisé dans le consistoire du 27 juin de la môme année, il fut sacré le 25 septembre suivant, dans la cathédrale de Meaux, par Son Eminence le cardinal Henri Thiard de Bissy, assisté de Charles-Alexandre le Filleul de la Chapelle, évêque de Vabres, et de Louis-Gui Guérapin de Vauréal, évêque de Rennes. Il prêta, le 2 octobre suivant, entre les mains du roi, le serment de fidélité d'usage. En 1719, il avait reçu le bonnet de docteur en théologie.
Après avoir, pendant près de trois années, administré le diocèse de Saint-Papoul, où il eut à combattre l'hérésie janséniste que son prédécesseur y avait implantée, M. de Charancy fut transféré à l'évêché de Montpellier par un brevet royal du 22 avril 1738. Des bulles lui furent accordées en cour de Rome, et il arriva à Montpellier le 15 novembre de la même année. Le lendemain, il fut reçu et installé par le chapitre dans la cathédrale Saint-Pierre.
A peine arrivé, M. de Charancy s'attacha avec soin à effacer jusqu'à la moindre impression qu'auraient pu faire dans l'esprit de ses diocésains, les principes peu orthodoxes de Colbert de Croissy, son prédécesseur. Il publia, à cet effet, le 7 mars 1739, un mandement où, après avoir retracé tout ce qui s'était passé dans l'Église depuis près d'un siècle, au sujet du livre de Jansénius, il ordonna que les Constitutions d'Alexandre VII, des 16 octobre 1656 et 15 février 1665, et celle de Clément XI, du 16 juillet 1705, commençant par ces mots : Vineam Domini Sabaoth, seraient inviolablement observées dans son diocèse, nonobstant tous les actes contraires qui pourraient y avoir été faits depuis quelques années. Il n'eut pas de peine à faire recevoir ce mandement par son chapitre.
Il n'en fut pas de même de quelques curés ou prieurs, notamment de Jean Gras, curé de Leyrargues, qui s'obstina à ne pas vouloir publier ce mandement. M. de Charancy, après deux injonctions faites le 30 août, au curé récalcitrant qui fit signifier au promoteur un acte d'appel, dut, le 5 septembre, rendre une sentence qui déclarait l'appel du curé nul, frivole, téméraire, injurieux à l'Église et schismatique, et en conséquence, que Jean Gras avait encouru l'excommunication majeure et la privation de tous ses bénéfices. Le 10 du même mois, il fit publier au prône, dans toutes les paroisses, un Mandement portant injonction de regarder le curé de Leyrargues comme retranché du corps de l'Église, et d'éviter toute société et fréquentation avec lui. Un écrit injurieux pour le prélat fut alors répandu dans le diocèse, et M. de Charancy y répondit par une Lettre pastorale du 24 septembre, à laquelle répliqua, le 15 novembre suivant, Jean-Baptiste Gaultier, par une lettre qu'on appelait agréablement dans le parti les verges d'Héliodore, et qui fut réimprimée plusieurs fois, notamment en 1756, sous ce dernier titre, in-12. Elle était intitulée d'abord : La foi des appelants justifiée contre les calomnies contenues dans une Lettre pastorale de M. de Charancy, du 24 septembre 1740.
On vit paraître peu après un long factum, ayant pour titre : Plainte et protestation de Jean Gras, curé de Leyrargues, et de Théodorit Mercier, prêtre, curé de Saint-Aunès d'Aurous, tous deux du diocèse de Montpellier, excommuniés, le premier par sentence de M. Berger de Charancy, du 5 septembre 1740, et le second par sentence de M. François Le Noir, official de l'évêché de Montpellier, du 16 du même mois et an, dénoncés pour excommuniés aux prônes des messes de paroisse du diocèse de Montpellier, par ordonnances de M. l'évêque des 10 et 28 du même mois de septembre 1740, à l'Église universelle, à notre Saint Père le Pape, à tous les évêques catholiques, et notamment aux évêques de France, dont ils implorent la protection et la justice, et à tous les fidèles à qui ils demandent le secours de leurs prières et la consolation de leur charité (17 et 27 décembre 1740). — En France, 1741, in-4°.
M. François Villebrun, curé de Sainte-Anne, à Montpellier, avait, à l'égard du Mandement du 7 mars 1739, tenu la même conduite que le curé de Leyrargues. Après les injonctions canoniques, un décret de l'official, du 8 avril suivant, le déclara suspens et interdit de toutes fonctions curiales, nonobstant toutes ses récusations, et ce décret fut confirmé le 30 du même mois, par M. de Charancy. Le 24 novembre, il parut un écrit intitulé : Apologie pour les curés de Montpellier, et, au commencement de janvier 1740, on imprima une Consultation de 14 avocats de Paris, au sujet de la sentence de l'officialité contre M. Villebrun, et du Mandement de M. de Gharancy ; mais, le 30 du môme mois, ce prélat obtint un arrêt du conseil sur requête, qui confirma cette sentence et déclara la procédure régulière.
Nous n'entrerons pas dans le détail des poursuites que M. de Charancy fut obligé de faire contre quelques communautés, contre M. Sabbatier, prieur-curé de Saussan, et d'autres prêtres qui prétendaient substituer leur propre jugement à celui de l'Église. Divers refus de sépulture ecclésiastique lui suscitèrent aussi quelques embarras.
M. de Charancy donna, le 1er juillet 1742, un autre Mandement et une Instruction pastorale pour la publication de la bulle Unigenitus. Après avoir encore annullé tous les actes qui pouvaient avoir été faits dans son diocèse contre cette Constitution, il condamna le livre des Réflexions morales et les cent une propositions qui en avaient été extraites, de la même manière et avec les mêmes qualifications que le Pape les avait condamnées. Non-seulement le chapitre cathédral adhéra d'esprit et de cœur à la bulle Unigenitus, ainsi que l'avait déjà fait le synode du diocèse tenu le 12 juillet suivant, non-seulement il fit transcrire sur ses registres cette bulle, et le dispositif du Mandement épiscopal, mais il voulut encore donner de la publicité à sa conduite en faisant imprimer la délibération qu'il prit à ce sujet le 16 du môme mois. En satisfaisant son zèle, il donna dans cette occasion une nouvelle preuve de sa soumission à l'Église.
Divers membres du clergé diocésain se montrèrent moins accommodants. Ils publièrent, le 25 août 1742, une pièce intitulée : Lettre de plusieurs curés, bénéficiers et autres prêtres de la ville et du diocèse de Montpellier à M. Georges-Lazare Berger de Charancy, leur évêque au sujet de son Mandement du 1er juillet 1742 pour la publication de la bulle Unigenitus et Mémoire apologétique pour la défense des ecclésiastiques de ce même diocèse accusés dans leur foi dans ce même Mandement (S. L.), 1744, in-4°, 102 pages. On ajouta que cette lettre avait été signée par 27 curés, bénéficiers ou prêtres (qu'on ne nomme pas), et qu'elle avait été remise le 2 novembre à M. le promoteur, pour être présentée à M. l'évêque. 1° Ces presbytériens ne font que répéter ce qui a été dit cent fois par le parti janséniste contre l'unanimité des évêques acceptants et contre les censures in globo. Ils osent vanter au contraire l'unanimité des opposants, dont les uns ont soutenu que les cent une propositions étaient cent une vérités fondamentales, et les autres, que plusieurs d'entre elles étaient très-mauvaises et très-condamnables, comme le fit M. de Béthune, évêque de Verdun, appelant, les uns, tels que le cardinal de Noailles, soutenant que la bulle pouvait être reçue avec des explications, les autres, Colbert de Croissy, par exemple, prétendant que c'était une pièce détestable que nulle explication ne pouvait faire passer. 2° Au reproche qu'on faisait au parti janséniste d'être sans chef et sans évêques, les 27 ministres jansénistes répondaient qu'ils avaient pour eux tous les évêques appelants qui étaient morts. Par cet ingénieux moyen, ils se passaient des évêques vivants et réduisaient tout le corps pastoral aux seules ombres d'une quinzaine de pasteurs trépassés. 3° Ils prétendaient que l'acceptation des quarante, du 13 mars 1720, avait été relative et s'efforçaient de le prouver : 1° par Je tissu même des Mandements, où il n'y avait pas un mot qui pût le faire soupçonner, 2° par la lettre d'une trentaine d'évêques, écrite en janvier 1716, au duc d'Orléans, régent de France, lettre fausse, supposée, dont la fausseté a été démontrée par le cardinal de Bissy, dans son instruction pastorale de 1725, pages 226 et 227, en un mot, lettre chimérique qu'on a défié les jansénistes de produire et qui n'a subsisté que dans leur imagination. La lettre des curés du diocèse de Montpellier, est suivie d'un mémoire apologétique de 94 pages.
Lorsque M. de Charancy convoqua ce synode, MM. Villebrun, curé de Sainte-Anne, Sabbatier, de Saussan, Gras de Leyrargues et Mercier, de Saint-Aunès d'Aurous avaient fait signifier au promoteur, un acte de protestation contre la convocation à ce synode des ecclésiastiques, qui les remplaçaient dans leurs cures, arguant de nullité tout ce qui y serait fait. Parmi les appelants qui protestèrent également, les historiens jansénistes citent les abbés Estève, curé de Saint-Vincent de Barbeyrargues, Dol, curé de Saint-Jean de Cuculles ; de Brignac, curé de Restinclières. Ce dernier par ordonnance épiscopale du 30 juillet, fut déclaré privé de ses bénéfices et frappé d'excommunication majeure.
Dans l'intervalle de toutes ces procédures, il parut, sans lieu ni date, en un format in-quarto, deux consultations imprimées, une du 28 août 1742, signée de dix avocats au parlement de Paris, au sujet du synode tenu à Montpellier, par M. de Charancy, le 12 juillet, et qui décida avec l'outrecuidance parlementaire habituelle, que les curés consultants, « sont en droit » d'interjeter appel comme d'abus, tant de la convocation de ce » synode, que de ce qui s'y est passé. On s'efforce de prouver » que ce synode n'est ni canonique dans sa convocation, ni » libre dans sa tenue, que les lois du royaume et les règles de » l'Église y ont été enfreintes, que ce n'est point un synode, » mais un scandale trop contraire à l'esprit de l'Église pour » pouvoir être toléré. » La seconde constitution, souscrite de vingt avocats au parlement de Paris, au sujet du même Mandement pour l'acceptation de la bulle, est datée du 5 septembre 1742, et porte qu'on ne peut trop promptement arrêter les progrès des abus, des excès, et des semences de trouble dans l'Église et dans l'État que contient ce Mandement, et que l'on doit l'attaquer, non-seulement par des réclamations, mais par des appels tant comme d'abus qu'autrement.
Un arrêt du conseil, en date du 26 avril 1743, rendu à la requête de M. de Charancy, prononça la suppression de ces deux consultations qui avaient été publiées un mois auparavant. A cette époque, M. de Charancy, avait appelé à Montpellier, pour y prêcher une mission, le célèbre Père Bridayne. Le 1er février 1745, il publia une Ordonnance et une Instruction pastorale en 18 articles sur la communion pascale. L'omission du devoir pascal y est mise au nombre des cas réservés à ses grands vicaires ou à ceux qui en avaient reçu de lui le pouvoir. Il y recommanda aux confesseurs de se conformer exactement aux règles de l'Église et aux instructions de saint Charles Borromée. Avant sa promotion à l'épiscopat, M. de Charancy avait aidé de ses réflexions et de ses lumières dom Toussaint du Plessis dans la composition de l'histoire de l'Église de Meaux. Il fit, en 1748, imprimer à Toulouse, en 3 volumes in-12, une édition du Catéchisme de Montpellier, composé par le P. Pouget. Cette édition fut purgée avec soin de toutes les expressions ayant une tendance janséniste.
Le diocèse de Montpellier perdit son évêque le mercredi 14 février 1748, sans qu'aucune maladie ait précédé cette perte. Les domestiques de M. de Charancy n'ayant point été appelés comme d'habitude à son lever, entrèrent dans sa chambre sur les six ou sept heures du matin, ils le trouvèrent mort dans son lit. Depuis quelques mois, ce prélat se plaignait de douleurs dans les entrailles, et il avait un certain pressentiment de la mort, qui l'avait porté à faire ses adieux aux évêques ses collègues, pendant la tenue des États de Languedoc. On l'inhuma dans le caveau de la cathédrale, destiné à la sépulture des évêques.
M. de Charancy avait été, en septembre 1740, nommé abbé commendataire de Boulbone. Il portait pour armoiries : d'azur, à un mouton couronné d'argent, passant, surmonté de trois étoiles de même, rangées de face.